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Les règlements « improvisés » du gouvernement fédéral concernant l’eau de ballast compromettent les objectifs environnementaux et cèdent la victoire aux américains

24 juin 2021 – Les nouveaux règlements sur l’eau de ballast que Transports Canada publiait mercredi ciblent injustement les exploitants de navires canadiens – qui ont investi des milliards de dollars dans de nouveaux navires écologiques à faible consommation de carburant – en accordant six années additionnelles aux propriétaires de navires plus âgés, dont ceux de pratiquement tous les navires américains qui évoluent dans les voies navigables intérieures des Grands Lacs et du Saint-Laurent, afin qu’ils s’y conforment. L’eau de ballast est cette eau que les navires doivent régulièrement emmagasiner et évacuer dans chaque port d’escale pour assurer leur stabilité et pour des raisons de sécurité.

La Chambre de commerce maritime a maintes fois alerté les organismes de réglementation fédéraux et les politiciens à l’effet que ce traitement inéquitable compromet l’uniformité des règles du jeu entre les flottes nationales canadiennes et américaines (qui utilisent principalement des navires plus anciens) et décourage tout nouvel investissement dans des navires nouveaux et plus économiques en carburant qui produisent beaucoup moins de gaz à effet de serre.

On reconnaît comme il se doit, dans le règlement sur l’eau de ballast, que les navires évoluant exclusivement dans les Grands Lacs et sur le Saint-Laurent doivent surmonter des défis uniques sur les plans technique et opérationnel et qu’on doit consacrer davantage de temps pour trouver des systèmes de traitement de l’eau de ballast qui répondent aux exigences en matière de conformité.  Ces navires ont jusqu’en 2030 pour installer de tels systèmes.  Cependant, sans la moindre justification, les règlements accordent aux navires construits à partir de 2009 qui évoluent sur les mêmes voies navigables jusqu’en 2024 pour s’y conformer, et ce, malgré l’absence d’une technologie adéquate disponible et capable d’assurer la conformité d’ici cette date.

Bruce Burrows, président et chef de la direction de la Chambre de commerce maritime, déclare : « Il s’agit là d’un développement très décevant qui représente un risque pour les emplois et qui retarde la reprise économique tout en contribuant peu à protéger l’environnement. Dans leur version actuelle, les règlements nuisent à l’environnement plutôt que de le protéger, puisque les propriétaires de navires plus récents devront demander des prolongations ou ils installeront à grands frais des systèmes qui ne fonctionnent pas.   Pendant ce temps, en raison des coûts exorbitants et croissants encourus lorsqu’on tente d’installer des systèmes, les nouveaux navires seront moins compétitifs, ce qui viendra ultimement miner complètement les buts du gouvernement canadien qui visent à réduire les émissions et à favoriser l’avancement de la technologie. »

Si on oblige les nouveaux navires à respecter l’échéance de 2024, les coûts additionnels seront probablement refilés aux clients dans les secteurs manufacturier et agricole au Canada, ce qui les rendra moins compétitifs que leurs homologues américains qui utilisent des navires américains non munis de systèmes sur ces mêmes Grands Lacs.  Ces coûts surviendraient alors que l’inflation touche les matières premières et les biens de consommation comme jamais en 10 ans et que le monde tente de se remettre de la pandémie.

Wade Sobkowich, directeur exécutif de la Western Grain Elevator Association (WGEA), déclare : « En ce qui concerne les navires qui transportent des céréales, les coûts inutiles de ces mesures inefficaces seront assumés en partie par les producteurs de céréales dans l’Ouest canadien, ce qui rendra le Canada moins compétitif sur le marché international. Le gouvernement fédéral devrait s’assurer que tous les navires qui évoluent sur les Grands Lacs et la voie maritime du Saint-Laurent bénéficient d’un traitement identique compte tenu de la dernière échéance de 2030 à tout le moins.  Nous suggérons également que le Canada tende la main à nos homologues américains afin de conclure, dans la région des GLVMSL, une entente bilatérale relative aux normes de gestion de l’eau de ballast qui soit pratique, équitable et réalisable pour les flottes nationales. »

Catherine Cobden, présidente et chef de la direction de l’Association canadienne des producteurs d’acier, déclare : « Pour être en mesure de desservir la chaîne d’approvisionnement nord-américaine et rester compétitive à l’échelle mondiale, l’industrie canadienne de l’acier dépend du transport maritime fiable, flexible et rentable des marchandises sur le réseau des Grands Lacs. Ces règlements concernant l’eau de ballast représentent un obstacle direct à l’industrie canadienne de l’acier et pour de nombreux autres utilisateurs du système de transport maritime de marchandises. Ces règlements entraîneront une hausse considérable de nos coûts, limiteront la disponibilité des navires et représenteront un risque pour les emplois de milliers de métallurgistes. »

Les navires nationaux n’introduisent pas de nouvelles espèces envahissantes

Depuis 2006, on n’a signalé aucune nouvelle introduction d’espèces envahissantes non indigènes (attribuables à l’eau de ballast) alors que les exigences du Canada et des États-Unis sur l’eau de ballast sont entrées simultanément en vigueur. Il est important de préciser que les navires nationaux du Canada et des États-Unis ne voyagent pas à l’étranger et ne risquent aucunement d’introduire de nouvelles espèces envahissantes.

Le gouvernement canadien affirme que les règles sont appliquées aux navires nationaux afin de réduire le risque de propagation possible d’espèces qu’on pourrait introduire à l’avenir dans les eaux qui relient les deux pays.  Leur estimation des avantages que présentent ces règlements repose presque entièrement sur les invasions futures théoriques – qui ne correspondent pas aux expériences véritables qu’on a connues sur les Grands Lacs au cours des 15 dernières années – et auxquelles les navires circulant en eaux intérieures ne contribuent pas.

Le calcul que fait Transports Canada des coûts associés à l’installation de systèmes de traitement sur les navires canadiens est aussi grandement sous-estimé.

Une étude récente du Research and Traffic Group a révélé qu’il en coûterait plus de 560 millions de dollars pour financer, installer et exploiter des systèmes de traitement sur tous les navires nationaux canadiens utilisés exclusivement sur les Grands Lacs et le Saint-Laurent, comparativement à 31 millions de dollars en avantages économiques prévus.

Les règles canadiennes contredisent également les règles américaines sur la voie navigable binationale. La U.S. Environmental Protection Agency a récemment décidé que les nouveaux navires qui évoluent uniquement dans les Grands Lacs et sur le Saint-Laurent et qui ont été construits après 2009 doivent surmonter les mêmes obstacles pour installer les systèmes que les navires plus anciens. Le raisonnement de l’EPA consiste dans ce qu’en raison du concept des navires, des conditions de fonctionnement comme la température et la turbidité de l’eau, des échanges commerciaux, de la durée des voyages et autres, il n’existe à l’heure actuelle aucun système de gestion de l’eau de ballast qui soit pratique ou convenable pour les navires qu’on retrouve sur les Grands Lacs ou sur le Saint-Laurent. Par conséquent, les raisons qui justifient la distinction avant et après 2009 invoquée par le gouvernement canadien pour justifier une date de conformité antérieure (2024), sans preuve véritable à l’appui, restent totalement irrationnelles et étranges dans les circonstances.

Gregg Ruhl, PDG de l’Algoma Central Corporation, qui détient et exploite la plus grande flotte nationale canadienne sur les Grands Lacs, déclare qu’en ciblant les navires neufs, on pourrait sournoisement amener les exploitants de navires à prolonger la vie des navires plus anciens et moins efficaces.

« Algoma Central a consacré au-delà de 500 millions de dollars afin de renouveler notre flotte des Grands Lacs avec 11 navires flambant neufs qui absorbent 40 % plus de carbone et qui sont munis d’épurateurs qui éliminent pratiquement tous les polluants atmosphériques, » de dire Ruhl.  « Nous sommes des chefs de file en environnement et nous sommes malgré tout pénalisés en raison des attentes injustes et impossibles. Est-il logique que les entreprises investissent dans le renouvellement de leur flotte pour ensuite se retrouver désavantagées par rapport à leurs concurrents? »

Canada Steamship Lines, une division du Groupe CSL Inc. qui a également construit sept nouveaux navires au cours de la dernière décennie, a récemment procédé à l’essai d’un nouveau système de traitement de l’eau de ballast à bord d’un navire utilisé sur les Grands Lacs fabriqué en 2012.  Louis Martel, président et chef de la direction de CSL, déclare que les premiers résultats démontrent que les coûts d’achat et d’installation excèdent de loin ce que le gouvernement avait prévu, que les coûts d’exploitation du système, incluant les retards dans les négociations attribuables aux contraintes du système, sont bien plus importants que ce qu’on avait prévu et que, l’aspect le plus important, le système n’est toujours pas capable de répondre de manière constante aux critères de rendement environnemental prévus dans le règlement.

Martel déclare : « Nous accordons énormément d’importance à la protection de l’environnement. Les organismes de réglementation du Canada devraient prendre le temps qu’il faut pour acquérir de l’expérience avec notre prototype et rédiger des lois plus intelligentes basées sur la science et sur l’équité du point de vue économique. Nous craignons qu’il devienne probable que ces règlements entraînent des conséquences négatives involontaires pour les industries, les consommateurs et l’environnement du Canada. »

Ces modifications contredisent également plusieurs objectifs politiques dans sa loi habilitante, soit la Loi sur la marine marchande du Canada, incluant l’élaboration d’un programme de réglementation qui encourage le transport maritime et le commerce viables, efficaces et économiques; la promotion d’un système de transport maritime efficace; les mesures ayant pour but d’encourager l’harmonisation des pratiques maritimes; ainsi que la mise en place d’un programme efficace d’inspection et d’application de la loi (par exemple, les navires seraient pénalisés s’ils ne respectent pas une exigence qui est impossible à respecter).

Burrows termine en disant : « Le gouvernement canadien impose à la flotte ‘locale’ du Canada une solution improvisée qui procurerait un avantage environnemental minimal tout en imposant un impact économique considérable sur le corridor commercial important des Grands Lacs et du Saint-Laurent. Autrement dit, certains de nos propriétaires de navires dépenseront ultimement des millions de dollars en technologies qui pourraient ne pas fonctionner, alors que notre gouvernement offre un traitement favorable à nos concurrents américains. »

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AUTRES RESSOURCES : 

Transport maritime sur les Grands Lacs et le Saint-Laurent Photos : https://www.flickr.com/photos/marinecommerce/albums/72157657049769546

Au sujet de la Chambre de commerce maritime

La Chambre de commerce maritime est une association binationale qui représente au-delà de 100 intervenants de l’industrie maritime, incluant des expéditeurs canadiens et américains d’importance, des ports, des terminaux, ainsi que des fournisseurs de services maritimes et des propriétaires de navires canadiens et étrangers. La Chambre défend une politique et une réglementation sécuritaires, durables, harmonisées et concurrentielles qui reconnaissent les avantages considérables du système de transport maritime sur les Grands Lacs, sur le Saint-Laurent, ainsi que dans les régions côtières et arctiques.

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